Alain Baudrey : « Il faut croire en ses rêves »

Alain Baudrey : « Il faut croire en ses rêves »

0
PARTAGER
Alain Baudrey devant son garage Opel (© Le Républicain de l'Essonne).

Les fêtes de fin d’année approchent. Noël est souvent synonyme d’espoir, d’espérance, et elle est l’occasion de rappeler qu’après les ténèbres, la lumière revient toujours.

A Etampes, Alain Baudrey, né orphelin, est l’illustration parfaite que, malgré les obstacles, rien n’est impossible dans la vie, surtout pas le bonheur. Dans le bureau de son garage automobile qu’il a créé en 2006, au bord de la RN20 à Morigny-Champigny, Alain Baudrey a le sourire, comme toujours. Cette année, pour la 16e année consécutive, il s’apprête à lancer l’opération “Un jouet, un sourire”. Cette grande collecte de jouets permet d’offrir aux enfants des familles soutenues par le Secours Populaire d’Etampes des cadeaux comme en reçoivent tous les enfants.

Ce moment de partage est l’une des fiertés d’Alain Baudrey, mais le chemin pour en arriver là a été long, et parfois tortueux. «Je suis né orphelin de parents en 1965», confie-t-il. Nous sommes alors en Seine-Saint-Denis et la vie s’annonce déjà compliquée pour ce bébé qui vient de voir le jour. C’est la valse des familles d’accueil, Alain en connaîtra 8 ou 9, des difficultés scolaires dans cette vie bousculée. «J’ai redoublé mon CM2», se souvient, celui qui aime à répéter qu’il n’a que deux neurones.

Et les péripéties se succèdent. «A 10 ans, on me dit que j’ai une mère, et je me retrouve chez cette femme paralysée, en fauteuil, qui a eu la polio à l’âge de 3 ans», c’est un choc. Pas de conte de fées ici et de retrouvailles idylliques, mais la vie à l’état brut. Au bout d’un an, il s’enfuit, se retrouve dans une pension, puis une autre. Ensuite, quatre ans en Israël, « où j’ai appris à me battre », l’armée, et ça y est, Alain a 20 ans. «J’ai eu un parcours compliqué. Jusqu’à 20 ans, c’était comme si j’étais sur un ring de boxe et que chaque jour je prenais des coups. Là, enfin, la vie commençait», résume-t-il.

Et cela tombe bien, car une chose n’a jamais quitté Alain, le rêve d’une autre vie. «Quand on est gamin et qu’on est orphelin, on s’imagine une vie, des parents. Tu rêves que ta mère c’est Maryline Monroe ». Très tôt, il se rêve en patron, en homme qui décide. «Je m’inventais une vie de dirigeant».

Une collecte de jouets chaque année pour le Secours Populaire

A 20 ans, avec son CAP de magasinier, ce rêve pouvait paraître inaccessible. Mais il y a quelque chose chez Alain qui ne passe pas inaperçu. Son patron se dit alors «il n’est pas si con Alain» et il lui donne sa chance. Il se révèle alors. «Je sais m’exprimer et je sais dialoguer. Je me rends compte que je sais convaincre les gens, et que je tiens ma parole auprès d’eux ». Il devient vendeur, chef des ventes, directeur des ventes. Quelle réussite !

Mais un rêve de son enfance ne l’a pas quitté, celui de diriger, d’être son propre patron. Il veut reprendre un garage près d’Etampes et il doit à nouveau utiliser son talent. «Je n’avais pas un rond d’avance. J’ai dû convaincre la banque de me suivre. J’ai essuyé un premier refus, mais j’y suis retourné », se souvient-il. Et, le 12 mai 2006, le garage Baudrey V. pour “beau de rêver” ouvre ses portes. L’enfant né orphelin 41 ans plus tôt est devenu patron.

Il n’a cependant pas oublié son parcours. «Dans ma vie, je me suis toujours dit que j’aiderai ceux que je peux aider», confie-til. Et, dans la rue, il avoue ne pas pouvoir passer devant un SDF sans systématiquement lui donner un peu. Mais il décide d’aller plus loin, et lance l’opération « Un jouet un sourire » dont ce sera la 16e édition cette année.

Grâce à sa mobilisation, et celle de ses partenaires, l’Etampes rugby club et l’Athlétic club d’Etréchy, ce sont des milliers de cadeaux qui ont ainsi pu être distribués aux enfants des familles soutenues par le Secours Populaire d’Etampes. Une distribution à laquelle il vient toujours participer pour voir le sourire des enfants.

Un parcours exceptionnel, mais dont Alain Baudrey n’aime pas se vanter. « La vie est devenue belle », résume-t-il en toute simplicité. Ne s’attardant pas sur son passé, il estime que ces épreuves difficiles, il a su les surmonter, « car je suis un vrai bosseur». «J’ai eu de la chance, j’aurai pu avoir des parents absents, qui boivent ou se frappent», pense-t-il.

Mais, sa grande chance, cela a été les rencontres, des gens qui lui ont fait confiance et à qui il a fait confiance. «Il faut savoir donner sa confiance, c’est ça que souvent les gens n’osent pas faire ». Ces rencontres, les bons choix entre «un chemin noir et un chemin blanc », ont mené Alain jusqu’à aujourd’hui. «Grâce à tout ça, j’apprécie en centuple ce que j’ai aujourd’hui», mais il reste humble, «je ne me sens pas meilleur qu’un autre, mais je me sens privilégié ».

Alain a aujourd’hui 2 fils et une fille. Il est évidemment leur modèle, et vu son parcours la figure paternelle est impressionnante. «Ma fille m’a dit un jour, avec toi, la barre est tellement haute », témoigne Alain. Mais, le parcours d’Alain Baudrey, jusqu’à aujourd’hui, nous démontre surtout que la barre n’est jamais trop haute. Elle est franchissable si on s’en donne les moyens et si on croit en ses rêves. Pour paraphraser Mark Twain, il ne savait pas que c’était impossible, alors il l’a fait. Une leçon de vie que l’on devrait tous retenir.

Alain Baudrey n’a jamais oublié son parcours, et chaque année il organise une collecte de jouets au profit des enfants du Secours Populaire d’Etampes (© Le Républicain de l’Essonne).