Le Républicain

Elles se retrouvent après 35 ans

Fatiha Wycisk et Myriamme se retrouvent après 35 ans. ©Marguerite de Becdelièvre

Elles s’étaient quittées à 12 et 18 ans. Après un long silence, elles se sont revues le 14 octobre.

Elles pensaient ne jamais se revoir. Pourtant, les voilà à nouveau réunies. Et 35 ans plus tard, ce sont les mêmes larmes de joie qui les animent. En 1979, Fatiha Wycisk a 18 ans quand elle laisse tout : sa vie dans le sud de la France, ses amis, ses habitudes et surtout sa sœur, Myriamme. Fatiha raconte avoir fui « des valeurs, des traditions familiales qui étaient trop lourdes à porter ». Du jour au lendemain, elle a quitté sa famille (sept frères et sœurs), « pour en retrouver une autre de substitution », explique-t-elle. Et mercredi 14 octobre, les deux sœurs se sont revues pour la première fois depuis cette rupture. Des retrouvailles inespérées. « Quand Fatiha est partie, j’avais 12 ans. Il pleuvait. C’est tout. Je ne me souviens que de ça, on ne s’est jamais revues depuis. Elle était considérée comme la pestiférée », précise Myriamme.

Départ pour une deuxième vie

C’est à Savigny que Fatiha débarque en 1979. Elle y restera dix ans. C’est un sentiment de liberté qui, au départ, la traverse. « Le Ramadan, les interdictions alimentaires, je me dis que cette époque est révolue. » Ses choix lui appartiennent désormais. En tout cas en apparence. En effet, Fatiha appartient à la communauté des témoins de Jéhovah, la cause de son départ. « J’ai découvert cette communauté à 15 ans. Elle m’apportait tout ce dont j’avais besoin. Ils m’ont lancé un ultimatum : c’était soit eux, soit ma vraie famille. Je les ai choisis », explique-t-elle. Embriguadée à la sortie de l’adolescence, Fatiha a tout donné pour cette nouvelle famille. Elle se mariera avec un Allemand quelques temps plus tard, également membre des témoins de Jéhovah.

Une lettre pour dire au revoir

Après 10 années à servir sa communauté, la toute jeune mère se rend compte de la spirale dans laquelle elle est tombée. Plus encore, à quel point il est difficile d’en sortir. « Vous le payez très cher. On ne vous regarde plus. Vous êtes comme punie après avoir été excommuniée », confie Fatiha. En 1989, elle quitte cet univers et tente de se reconstruire loin de toute cette agitation. Elle part s’installer dans le sud avec son second mari. Si le mariage échoue, Maroussia, sa seconde fille nait : « Nous étions très proches, on se racontait beaucoup de choses ». Mais aujourd’hui, sa fille, à son tour, a décidé de rejoindre les témoins de Jéhovah. Elle réside aujourd’hui au Canada : « Je n’ai pas de nouvelles depuis un an. Quand elle est partie, elle m’a simplement laissé une lettre ». Si Fatiha est désormais sortie de la communauté, elle a aujourd’hui un sentiment de colère : « Ils m’ont eu deux fois. Je pensais m’en être sortie, mais finalement non. Ils m’ont pris ma fille ».

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