Sarah El Haïry, haute-commissaire à l’Enfance, était en visite à l’école élémentaire de savigny-sur-Orge pour faire un retour sur l’opération « 10 jours sans écran », en compagnie du personnel éducatif, des élèves et de leurs parents.
Du 13 au 22 mai, nombreux sont les enfants du pays à avoir du prendre leur mal en patience. Pendant cette période se tenait en effet le défi « 10 jours sans écrans », initiative pédagogique nationale visant à « sensibiliser les enfants, les adolescents et leurs familles à l’usage raisonné des écrans » en supprimant l’utilisation d’écrans de loisirs pendant dix jours. Objectif affiché : « favoriser des temps de partage, de lecture, d’activités physiques ou culturelles, tout en incitant à une réflexion sur nos usages du numérique ».
Parmi les établissements scolaires participant à l’opération, on comptait l’école élémentaire John-Kennedy de Savigny-sur-Orge. Jeudi 22 mai, l’école accueillait justement dans ce cadre la haute-Commissaire à l’Enfance, Sarah El Haïry, venue découvrir les actions mises en place par la communauté éducative et écouter les difficultés, les ressentis et les nouvelles ambitions des enfants et parents ayant participé au défi.
Les parents en première ligne
Premiers à être entendus par l’ex-ministre déléguée chargée de l’Enfance, de la Jeunesse et des Familles, l’équipe éducative de l’établissement et quelques parents d’élèves ont pu partager leur ressenti sur le défi, alors en cours. « Lorsqu’on a présenté les actions aux élèves, nous avons eu des réactions surprenantes, avec beaucoup de tristesse à tous les niveaux scolaires », souligne ainsi Karine Chovanec directrice de l’école élémentaire. Un constat appuyé par l’une des enseignantes, notant qu’une élève de CP a même pleuré à l’annonce du début du défi. « Les soucis qu’engendrent les écrans apparaissent dès l’école élémentaire, notamment avec l’usage des montres connectées, poursuit la directrice. Ils peuvent à terme engendrer des problèmes relationnels, puisqu’ils mesurent souvent la qualité de leurs interactions sociales grâce à ces outils ». Une problématique à laquelle s’ajoute une question de santé publique, Sarah El Haïry remarquant le « véritable sujet de santé publique » qu’engendre l’utilisation excessive des écrans, à l’image du manque de sommeil, de la myopie ou même de l’obésité.
« Le défi a pour nous aussi un effet miroir : on se rend compte du nombre d’écrans que nous avons dans nos domiciles et la difficulté de s’en passer totalement. »
Mais si les enfants ont sans doute parfois trouvé le temps long sans télé, tablette, smartphone ou console de jeu, que dire de leurs parents ? Car le défi, évidemment respecté dans le cadre scolaire, s’étendait également au retour à la maison. Et pour un adulte, se couper de toute activité numérique n’est pas non plus une sinécure. « C’est difficile en tant que parent, car nous passons une partie de notre vie sur nos smartphones et dans un monde hyperconnecté, on a du mal à s’en passer, reconnaissait l’une des mamans d’élève présente. Le GPS dans la voiture, le télétravail sur ordinateur, Google pour répondre à une question dont on n’a pas la réponse… Le défi a pour nous aussi un effet miroir : on se rend compte du nombre d’écrans que nous avons dans nos domiciles et la difficulté de s’en passer totalement. »
Gagner du temps pour des activités
Et les enfants eux-mêmes, qu’en pensent-ils ? Pour le savoir, Sarah El Haïry a échangé avec eux directement. Réunis dans une salle de classe, quelques dizaines d’élèves de tous niveaux ont ainsi échangé avec la haute-commissaire sur leur perception du défi. Et si le démarrage a pu être douloureux pour certains, il semble qu’ils y aient trouvé du bon. « Ca fait bizarre au début parce que d’habitude, en rentrant de l’école, je regarde la télé, expliquait ainsi une petite fille. Mais finalement ça me plaît parce qu’on passe plus de temps à jouer. »

Jeux de société, fabrication de gâteaux ou football [ndlr : le défi s’accompagne chaque jour d’une suggestion d’activité], les élèves ont en tout cas, à les entendre, apprécié un temps de qualité hors des écrans. Tout en soulignant l’une des principales difficultés, à savoir de convaincre la famille de rejoindre le mouvement. « Au début ça fait un peu peur, on stresse de ne pas y arriver, se rappelle l’un des élèves. Mais ça m’a permis de mieux profiter de ma famille et de passer plus de temps dehors. Par contre, c’était difficile parce que ma sœur ne pouvait pas le faire et j’étais un peu attiré par le bruit ! ».
Un défi à généraliser ?
Après avoir félicité les élèves pour leur travail effectué en parallèle du défi (« Arrête de jouer à la Nintendo, va plutôt faire dodo », « Trop d’écrans, ça rend les yeux piquants » et autres « Arrête de jouer à Roblox, va plutôt faire de la boxe » garnissaient notamment les murs de l’établissement dans le cadre d’une activité « slogans »), Sarah El Haïry a effectué un bilan de l’opération et de sa visite. « Ecouter ainsi les parents, les enseignants et les élèves permet de se rendre compte de la mobilisation collective qui est nécessaire, a t-elle indiqué. Le constat est là : c’est difficile de se détacher des écrans, mais cela fait du bien » Tout en notant que le nombre de participants à l’opération « 10 jours sans écran » a presque doublé en un an, passant de 68 000 à 120 000, la haute-commissaire a reconnu qu’il restait bien du chemin à faire, à la fois pour les enfants mais aussi pour leurs parents. « Il est important de prendre conscience de la place qu’ont pris les écrans dans notre quotidien et de leur conséquence sur le développement du cerveau. C’est un sujet de santé public qu’il va peut-être falloir porter davantage, avec des opérations comme celles-ci qui ont vocation à être généralisées. »
En attendant, à la question « allez-vous continuer à vous passer d’écrans après le défi ? », la plupart des élèves a répondu, sourire en coin, qu’ils essaieraient… « de temps en temps ».

A lire aussi : Faire écran, face au cyber-harcèlement