Essonne : la moisson 2023 décevante

Essonne : la moisson 2023 décevante

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On moissonne à Angerville le samedi 8 juillet dernier (photo © Le Républicain de l'Essonne).

Si les résultats de cette moisson 2023 sont hétérogènes sur l’ensemble du Département, selon la qualité des terres ou le niveau de pluviométrie, globalement, la récolte de cette année est moyenne, notamment sur le blé, la culture reine.

A la charnière entre le mois de mai et le mois de juin, on ressentait l’optimisme des agriculteurs essonniens à quelques semaines de la moisson. Les cultures d’hiver et de printemps avaient jusque-là bénéficié de conditions idéales et présentaient une belle croissance. « Si on n’a pas de pépin, nous devrions avoir une belle récolte », confiait Fabien Pigeon, exploitant à Chauffour-lès-Etréchy fin mai.

Un peu plus de 6 semaines plus tard, la déception est partagée par tous. Les conditions météorologiques du mois de juin ont fait des ravages. A l’absence de pluie, se sont ajoutés des épisodes de fortes chaleurs et du vent qui ont contribué à assécher puis griller les cultures sur pied. Hormis quelques chanceux qui ont bénéficié d’orages très localisés début juin, et ceux qui ont des terres profondes, le bilan est très moyen.

« Sur les céréales, la moisson est en retrait. Nous avons des qualités de grain qui ne sont pas belles. Le coup de chaud de début juin a endommagé les grains, et nous nous retrouvons avec une qualité inférieure à la moyenne sur 10 ans», commente Fabien Pigeon, alors que sa récolte touchait à sa fin.

La qualité du grain de blé est essentielle pour sa commercialisation. Le poids du grain, le poids spécifique, doit atteindre un niveau minimum pour être vendu au prix le plus élevé. Ce niveau est loin d’être atteint sur l’ensemble de la récolte.

Pour l’orge de printemps, la situation est encore plus difficile. Vendu notamment pour faire de la bière, le grain doit cette fois respecter un calibrage, avec des exigences de 90% de grain calibré dans les lots vendus.  «Nous avons des secteurs à 80 %, mais nous en avons également qui ne sont qu’à 20 %. Cela monte à 50% dans la plupart des lots», confie Jean-Marc Foucher, président de la Coopérative Ile-de-France Sud, et exploitant à Villeconin.

Sur le colza, une autre culture répandue en Essonne, les résultats sont également moyens. Pour les pois d’hiver, les résultats sont plutôt médiocres. Les orges d’hiver sont assez hétérogènes, mais les résultats sont en général plutôt meilleurs que sur les autres cultures. «Notre métier est dépendant à 50 % du climat. Nous faisons le maximum pour avoir une meilleure récolte possible, mais cette année, nous avons été victimes du climat», résume le président.

Un contexte qui complique tout

A ces résultats décevants, s’ajoutent un contexte économique qui pèsera sur le résultat de cette année. Les coûts de production de cette saison sont en effet particulièrement importants. «Nous avons acheté les intrants très chers pour cette saison», confirme Dominique Vallée, exploitant à Les Granges-le-Roi. Le conflit entre la Russie et l’Ukraine a provoqué une crise énergétique qui pèse lourd sur les matières premières, dont particulièrement les intrants agricoles qui ont été achetés en début de saison.

A ce moment-là, les cours étaient encore élevés. Mais durant les derniers mois, ceux-ci ont considérablement diminué. Cela provoque donc un effet ciseau dévastateur avec des coûts de production très élevés et des cours de vente inférieux à ces coûts de production. Cette saison 2023 pourrait donc bien être synonyme de perte financière ou, au mieux, d’année tout juste à l’équilibre.

Cette situation est complètement à l’inverse de la saison 2022, où les cours avaient considérablement augmenté mais les intrants avaient été achetés à des prix raisonnables. «Cette année sera une année à perte, c’est évident», estime Fabien Pigeon. «Nous allons perdre cette année ce que nous avons gagné l’an dernier», avoue Nicolas Galpin, exploitant à Auvernaux.

C’est une mauvaise nouvelle après une année 2022 qui avait regonflé le moral de la profession. Depuis la catastrophique année 2016, les agriculteurs ont subi une succession d’années soit mauvaises, soit au mieux dans la moyenne basse.  «Il aura fallu deux années consécutives comme 2022 pour renforcer des trésoreries qui ont été bien entamées», estime Jean-Marc Foucher.

Et l’année n’est pas finie. Pour les cultures encore en terre aujourd’hui, comme les maïs ou les betteraves, rien n’est perdu malgré la sécheresse. Mais de la pluie dans les deux semaines à venir va être indispensable. Pour les betteraves enfin, l’inquiétude reste forte sur le possible développement de la jaunisse. Celle-ci est déjà présente, mais pour l’instant assez modérément, dans les parcelles. Les betteraviers croisent les doigts pour qu’elle ne s’étende pas, sinon, cette saison 2023 pourrait bien être maigre au moment de faire les comptes.